đż Au cĆur du continent africain, un vent de changement souffle sur le Kenya, portĂ© par une voix puissante et dĂ©terminĂ©e : celle de Nelson Havi, un avocat bien connu dans le pays et ancien prĂ©sident de la Law Society of Kenya. Peu timide lorsquâil sâagit de briser les tabous, il vient dâannoncer son intention ferme de dĂ©poser une pĂ©tition constitutionnelle pour dĂ©criminaliser lâusage, la culture et la vente du cannabis Ă travers toute la nation. đ§ Difficile dâimaginer un sujet plus clivant et plus chargĂ© symboliquement dans la sociĂ©tĂ© kenyane actuelle, tant il oppose modernitĂ© et tradition, libertĂ© individuelle et cadre lĂ©gislatif strict.
đ„ « Je dĂ©poserai la semaine prochaine une requĂȘte constitutionnelle visant Ă dĂ©clarer inconstitutionnelles toutes les sections de la loi qui criminalisent la culture, la transformation, la vente et lâutilisation de la marijuana », a-t-il dĂ©clarĂ© avec aplomb. VoilĂ de quoi allumer une mĂšche dans le dĂ©bat public et poser une question Ă©pineuse : Ă quoi bon persister dans une politique de prohibition alors que le monde Ă©volue Ă grande vitesse ?
đ Car oui, Nelson Havi nâest pas un simple provocateur. Il sâappuie sur une dynamique internationale oĂč de plus en plus de pays repensent leur approche du cannabis, non pas comme un flĂ©au Ă Ă©radiquer, mais comme une plante aux multiples usages encore trop souvent ignorĂ©s. MĂ©dicalement, Ă©conomiquement, culturellement : le cannabis est en train de retrouver une place dans les sociĂ©tĂ©s modernes. Et pourquoi pas au Kenya ?
đ Bien entendu, ce combat ne tombe pas du ciel. Le Kenya vit une transformation sociale, poussĂ©e par une jeunesse connectĂ©e, mobile et avide de libertĂ©. Le sujet de la lĂ©galisation agite les dĂ©bats, en ligne comme dans la rue, entre les dĂ©fenseurs dâun ordre moral strict et ceux qui prĂŽnent une refonte des lois rĂ©pressives hĂ©ritĂ©es dâune autre Ă©poque. Et câest justement cette dissonance entre la rĂ©alitĂ© de lâusage du cannabis dans le pays et sa stricte interdiction qui alimente lâindignation. Les prisons kenyanes regorgent de jeunes incarcĂ©rĂ©s pour simple possession, et les perspectives de rĂ©insertion restent maigres. đ Pendant ce temps, ailleurs dans le monde, des entrepreneurs bĂątissent des empires lĂ©gaux autour de cette mĂȘme plante.
âïž Nelson Havi, fort de son expĂ©rience juridique, brandit donc la Constitution comme arme principale pour faire bouger les lignes. Ce quâil conteste, câest la lĂ©gitimitĂ© mĂȘme de criminaliser une plante alors que les preuves scientifiques sur ses usages thĂ©rapeutiques et ses vertus Ă©conomiques sâaccumulent. Il ne sâagit pas simplement de « lĂ©galiser pour lĂ©galiser », mais de repositionner le dĂ©bat sur la rationalitĂ© et la justice sociale. Une maniĂšre de mettre terme Ă des dĂ©cennies dâhypocrisie lĂ©gislative, tout en responsabilisant les citoyens.
đ Lâargument de santĂ© publique a aussi son importance. De nombreux pays ont basculĂ© vers une rĂ©glementation encadrĂ©e du cannabis, ce qui, sur le terrain, a permis de mieux contrĂŽler la qualitĂ© des produits consommĂ©s, dâaccroĂźtre lâinformation sur les usages, et surtout de diminuer la pression sur les forces de lâordre qui peuvent ainsi se recentrer sur dâautres prioritĂ©s. Pourquoi ne pas envisager un mĂȘme avenir au Kenya ?
đ La rĂ©alitĂ© est que lâusage du cannabis, bien quâillĂ©gal, est dĂ©jĂ largement rĂ©pandu dans de nombreuses rĂ©gions du Kenya. Quâil sâagisse de pharmacopĂ©es traditionnelles, de pratiques culturelles ou simplement de consommation rĂ©crĂ©ative, ce nâest en vĂ©ritĂ© un secret pour personne. Alors Ă quoi bon sâenfoncer dans une politique du dĂ©ni ? Ne serait-il pas temps dâouvrir les yeux et dâadmettre que la rĂ©gulation est souvent plus efficace que la rĂ©pression aveugle ?
đŁïž Ăvidemment, les voix opposĂ©es ne manquent pas. LâĂglise, certains Ă©lus conservateurs ou encore des figures mĂ©dicales alertent sur les risques de voir la jeunesse sombrer dans des abus si la lĂ©gislation Ă©volue. Mais ce que sous-estime souvent ce camp, c’est que la lĂ©galisation ne rime pas avec anarchie. Bien pensĂ©e, elle permet au contraire dâaccompagner, dâĂ©duquer, de responsabiliser. LĂ©galiser ne signifie pas promouvoir, mais reconnaĂźtre, encadrer et canaliser.
đŒ Il y a aussi, il ne faut pas lâoublier, un vrai enjeu Ă©conomique. Le marchĂ© du cannabis mĂ©dical ou rĂ©crĂ©atif reprĂ©sente une opportunitĂ© pour de nombreux pays africains, souvent en quĂȘte de diversification Ă©conomique. Cultiver du cannabis Ă des fins industrielles ou pharmaceutiques pourrait favoriser lâagriculture locale, crĂ©er des milliers dâemplois et attirer des investisseurs Ă©trangers. Le Kenya, grĂące Ă son climat, sa main-dâĆuvre compĂ©tente et sa position gĂ©ographique stratĂ©gique, pourrait devenir un acteur majeur de cette industrie florissante. Quel gĂąchis ce serait de rater le train pendant que dâautres foncent Ă toute vitesse vers lâavenir !
đ Et ce que propose Nelson Havi, ce nâest pas une utopie irrĂ©flĂ©chie, mais une dĂ©marche ancrĂ©e dans une analyse juridique rigoureuse. Il remet en question la constitutionnalitĂ© des lois actuelles, sâinterrogeant sur le respect des droits fondamentaux des citoyens. Le droit Ă la santĂ©, le droit Ă la libertĂ© individuelle, le droit Ă la vie privĂ©e : autant de principes qui sont potentiellement bafouĂ©s par une interdiction stricte du cannabis. Face Ă un tel constat, la pĂ©tition apparaĂźt comme un acte de courage juridique autant que comme un catalyseur politique.
đïž Mais il faut bien comprendre une chose : cette initiative nâaura dâeffet que si elle rencontre un Ă©cho dans la population. Le changement de loi, surtout sur des sujets aussi sensibles, passe toujours par le changement des mentalitĂ©s. La tĂąche est lourde, mais pas impossible. Il suffira que la jeunesse prenne la parole, que les mĂ©dias sâemparent du dĂ©bat, que les parents Ă©coutent plus que ce que lâon croit, pour que cette dĂ©marche dâapparence marginale prenne des airs de mouvement national.
đŹ Alors, est-ce que le Kenya est prĂȘt Ă faire tomber le mur de la prohibition ? Ce nâest pas certain. Mais ce qui est sĂ»r, câest que lâĂ©tincelle a Ă©tĂ© allumĂ©e, et que les conversations ont dĂ©marrĂ©. Et ça, câest dĂ©jĂ une premiĂšre victoire. En dĂ©posant cette pĂ©tition, Nelson Havi ouvre une brĂšche. Ce sera au reste du pays de la faire grandir, ou de la refermer. Toi, lecteur, tu fais aussi partie de cette histoire. Que tu sois pour, contre ou encore hĂ©sitant, tu ne peux plus faire comme si le sujet nâexistait pas. Il est lĂ , il te regarde. Et il attend ta rĂ©flexion.
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